La route des vins
Aujourd'hui, comme on s'est fait une ennemie de notre seule amie, Brigitte, on a décidé d'aller noyer notre chagrin dans l'alcool, et on est partis faire la tournée des vignobles de Napa et Sonoma. Notre tournée des caves californiennes n'a rien à envier à la tournée d'Eddie et Patsy dans les caves françaises.
On a quitté San Francisco sous un soleil radieux (mais une température frisquette) et on s'est dirigés vers Napa, où on a pris quelques informations. Où déjeuner dans un vignoble, pour picoler tout en mangeant ? Eh bien, on avait peu de choix. Les Américains ne mangeant qu'avec du Coca, le seul domaine possible était le domaine Chandon, un vignoble français de vin pétillant. On y est donc allés et on a fait péter le porte-monnaie pour fêter l'anniversaire d'Olivier quelque peu en avance. On a très bien mangé. Un peu nouvelle cuisine au niveau des portions, mais délicieux ! Bœuf et crème brûlée pour Olivier, coquilles St-Jacques et fondant au chocolat pour bibi. Et de l'excellent vin rouge pour Olivier, et un Chardonnay pétillant correct pour moi.
Avec en prime un très beau serveur, pour moi et non pour Olivier, à son grand dam. Le beau serveur m'a gratifiée d'œillades répétées et de sourires à tomber par terre, et à la fin du repas, il m'a offert une fleur que j'ai mise dans mes cheveux. Olivier en était vert de jalousie. Il n'est pas très fidèle... Il avait des pensées impures. (Là, je me dois d'intervenir, c'est Olivier qui prend la plume. Il faut que je rétablisse la vérité car Blandine a légèrement tendance à être érotomane. Forcément, comme elle avait un décolleté jusqu'au nombril et qu'elle faisait des mouvements de jambes à la Sharon Stone dans Basic Instinct, elle a cru que le serveur la regarderait. Mais pas du tout ! Quelqu'un d'aussi raffiné que lui ne pourrait absolument pas se satisfaire de la suffisance crasse de Blandine. Non, non, il est forcément attiré par plus de classe, moins de maniérisme et de déhanché de gourde, bref, c'était bel et bien moi qu'il regardait ! Et puis c'est facile de croire qu'il lui a offert une fleur alors qu'elle était automatiquement remise à chaque client ! Cette Blandine, elle s'y croit un max ! Et de toute façon, bien fait pour elle, sa fleur était toute fânée à la fin de la journée ! Je la foutrai à la poubelle ! Pas Blandine, la fleur. Enfin, j'hésite.)
On est sortis du restaurant, moi aux anges, Olivier boudant. Je me suis arrêtée sur la terrasse pour fumer une cigarette, et Olivier refusait de me parler, horriblement vexé que le serveur m'ait préférée à lui. (Une fois de plus, Blandine affabule totalement, je ne faisais pas la tête, j'étais dans mon monde avec tous mes petits amis et sachant pertinement que c'était moi qui étais dans les pensées du serveur et non cette insipide de Blandine.)
Il a fini par accepter de remonter en voiture et nous sommes allés visiter un domaine, Sterling, un peu plus au nord. On avait choisi ce vignoble à cause du téléphérique. On ne regrette pas notre choix, on a eu une très belle vue sur la vallée.
On a commencé la visite sagement. Belle demeure... avec une vue imprenable.
Bon, la station d'épuration moyen, mais le reste est charmant.
Et on a fait une petite visite des coulisses...
C'est assez pédagogique, ça ?
Bon, du moins pédagogique peut-être...
La dégustation ! On est quand même venus pour ça, et rien que pour ça. Alors, ça commence avec un Pinot gris. Après, un Chardonnay. Après...
On a vite perdu le compte, et oublié ce qu'on avait bu. Et quant à savoir quel vin on a préféré... Je peux regoûter le premier ? Non, le deuxième... Je sais plus. Le premier, encore... Le quatrième... Hips, j'ai le hoquet. Attends voir, c'est le deuxième que tu as préféré ? Attends, je le regoûte... C'était celui-là le deuxième ? Tavernier ! Encore un peu du troisième, je vous prie. A la vôtre.
Il est pas mal, ce vin, mais il tape un peu. Surtout quand on boit sans manger.
On arrive encore à se relever pour goûter un autre vin. La main est toujours sur la table. Mais quelques verres de plus nous achèvent presque...
On s'est traînés péniblement jusqu'au téléphérique...
Mais c'en a été trop. On a débordé...
On a été malades. Pourtant, le vin était bon (enfin, bof...). Mais la pente était rude, et la cabine du téléphérique tanguait fort désagréablement. Blurp.
On a fini par arriver en bas, et comme on avait tout vomi, on a pensé qu'on était prêts à reprendre la route. Enfin, moi, sans problème. Olivier a préféré faire d'abord une petite sieste.
Je me mets au volant sans plus attendre. Je l'attends tranquillement. Je suis en forme.
Je fais même quelques mouvements de stretching, notamment des jambes. Olivier se fait attendre. C'est pénible, moi je suis fraîche comme une rose, et lui cuve au pied des vignes.
J'attends...
J'attends...
Ah, ça y est, il se réveille et monte en voiture, Simone !
Il a un peu de mal à ne pas s'endormir, bonjour le copilote ! Alors que moi, je maîtrise...
Ensuite, pas grand-chose à signaler, d'ailleurs on se rappelle plus de rien. Qu'est-ce qu'on a pris comme route ? Aucune idée !
On est allés voir un geyser, de l'eau chaude, sans intérêt, donc. On espérait un geyser de champagne. On a été très déçus.
Enfin, au moins, il était ponctuel, le geyser, c'est déjà ça.
Nous sommes dans le Far Ouest, ne l'oublions pas. On voit donc une diligence, mais perchée, elle a sûrement été garée par des poivrots. On réprouve. Scandaleux.
C'était très joli tout ça, on rentre par la vallée de Sonoma. Un petit tour dans la ville, on se demande où sont les pauvres, là aussi, comme à Napa et à Carmel. C'est très charmant, mais si on habitait là, on se suiciderait au bout d'une semaine ou on deviendrait alcooliques, quelle horreur !
Après avoir trouvé de quoi survivre jusqu'à notre maison (Pringles et M&Ms, spécial dédicace Clément), on rentre. Mais en chemin, alors qu'il a fait chaud, très très chaud, et que le ciel est encore bleu à 8 heures du soir, on voit du brouillard à l'horizon. Un brouillard épais qui se cache derrière la montagne. On dirait une grosse bête, ça a l'air solide. Comme un ours polaire en coton hydrophile. Evidemment, Olivier n'est pas sensible à la poésie de mon image. (Mais si, bien sûr, et les marmottes mettent le chocolat dans l'aluminium !)
Pff ! En passant le pont, on ne voit même pas les pylônes rouges... Rien de rien. Il fait tout noir.